samedi 27 février 2016

Les paysans africains ont besoin d'un lobby

Les paysans africains ont besoin d'un lobby Des famines éclatent régulièrement en Afrique. Pourtant, ses 900 millions d'agriculteurs pourraient nourrir le continent - et même exporter leur production. Pour ce faire, ils ont besoin d'un appui politique. La bonne nouvelle pour commencer: gouvernements africains, bailleurs de fonds et agences de l'ONU ont redécouvert l'agriculture africaine. Pendant près de deux décennies ils avaient misé sur l'industrialisation des villes. L'agriculture n'était qu'accessoire.
Les anomalies sur les marchés des matières premières, les graves crises alimentaires vécues à partir de 2008 et les révoltes de la faim ont produit un choc salutaire. Il en résulte qu'au ministère allemand de la Coopération, on s'attelle de nouveau à élaborer des stratégies de développement qui mettent l'accent sur l'agriculture. Aujourd'hui encore 90% de la population africaine, soit 900 millions de personnes, travaillent dans l'agriculture. Même si la comparaison peut sembler boiteuse: qui aurait l'idée, absurde, en Allemagne, de fermer les petites et moyennes entreprises, pourvoyeuses de millions d'emplois et colonne vertébrale de l'économie allemande ? Quelles sont les capacités de l'agriculture africaine ? L'agriculture est synonyme de vie. Un être humain sur huit dans le monde ne mange pas à sa faim. La sous-alimentation sévit surtout en Asie du sud en en Afrique subsaharienne. Les chiffres sont alarmants. Ce dossier multimédia intitulé « L'Afrique peut-elle apaiser la faim? » se penche sur les chances et les défis de l'agriculture africaine. L'Afrique peut-elle se nourrir et même nourrir un jour ou l'autre un monde en pleine croissance démographique? Peut-elle à moyen terme devenir exportatrice de denrées alimentaires? Nos recherches en Afrique de l'est et de l'ouest, de même qu'auprès de sociétés chimiques allemandes incitent à la réponse suivante: oui, si les responsables politiques sur place et les bailleurs de fonds ici agissent de concert.
Un manque d'incitation aux investissements Et maintenant la mauvaise nouvelle: dans de nombreux pays d'Afrique, la défense du paysan ne se fait que du bout des lèvres. Les conditions ne sont pas réunies pour permettre aux paysans, non seulement de couvrir leurs propres besoins mais aussi de produire des surplus. L'Ethiopie en est un exemple: 85% des 90 millions d'habitants vivent de l'agriculture. Mais par nostalgie marxiste le gouvernement continue d'interdire la propriété foncière privée. Même les baux de fermage sont incertains. Le paysan n'est pas motivé pour investir dans sa petite parcelle, par exemple pour la protéger de l'érosion. Il utilise de coûteuses semences, jointes à des pesticides et des herbicides qui lessivent son sol déjà pauvre et le maintiennent captif de la pauvreté. Si la récolte est mauvaise, son endettement augmente. Les banques d'affaires africaines n'accordent toujours pas de crédits aux paysans. Comment pourraient-ils donc remplacer leur antique charrue en bois par des machines modernes qui accroitraient les rendements. Nombreux sont aussi les paysans qui, même au 21ème siècle, ne disposent toujours pas d'un bon accès aux marchés: à la saison des pluies la route pour le marché le plus proche est impraticable. Des études montrent que jusqu'à 50% des produits frais d'un paysan africain pourrissent pendant leur transport au marché - un chiffre totalement inacceptable. Et la liste des maux est encore longue.
Pas d'industrialisation de l'Afrique sans agriculture Comme le montrent les reportages des journalistes de la DW, peu de choses suffisent pour accroître considérablement la productivité des paysans et donc les rendements. L'irrigation au goutte-à-goutte, la rotation des cultures, l'amélioration des semences et les cultures bio ne sont que quelques exemples. Pour prévenir tout malentendu: il ne s'agit pas de jouer l'industrialisation contre l'agriculture. Il importe bien plutôt de faire l'un sans négliger l'autre. Terroir et usine, sol et BTP, il faut accélérer l'industrialisation de l'Afrique pour que le cacao ivoirien ne soit plus transformé à Hambourg mais à Abidjan. Il faut aussi que les gouvernements africains et leurs bailleurs de fonds traitent d'égal à égal afin de conclure un véritable partenariat au profit de la productivité alimentaire de l'Afrique. Les auspices sont plutôt favorables. Le soulèvement des affamés en Tunisie a fait chuter un régime dictatorial en 2011, il a fait souffler un vent de changement en Afrique du nord et a été un avertissement pour les décideurs africains. La faim est devenue un instrument politique aux mains des masses. Et les responsables politiques européens voient dans les camps de réfugiés de Lampedusa et Malte l'ampleur du désespoir causé par la faim en Afrique. Le moment est venu de conclure un « New Deal » pour l'agriculture africaine. Source: www.dw.com

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